Transmission ?
Il est question-là de transmission de vies à vies, au-delà de la mort, au-delà du départ de ceux qui portaient le secret de la flamme, qui conservaient et entretenaient le feu à la manière dépeinte par J-H Rosny Ainé.
Ces passages de relais, de témoins, d’expériences, de savoir, ces cadeaux de la vie à la vie peuvent être physiques ou bien idéels, d’une femme ou d’un homme à une femme ou à un homme, d’un objet à un autre. Il faudra donc assembler au gré des siècles, des années voire au gré des mois, assembler et unir tous les hommes de bonne volonté, généreux, libres, sans soumission mais dans un idéal de recherche et de perfectionnement.
Comment alors assembler sans transmettre, comment poser une clé de voute, conjuguer des tenons et des mortaises sans transmettre ?
Pour transmettre, à la manière de ceux qui inventèrent les Arcs-boutants ou bien les voûtes dites Plantagenêt, il faut être deux, un émetteur et un récepteur.
Celui qui sait offre, donne aux jeunes apprentis, aux poussins et aux benjamins, aux espoirs pleins de fougue et d’envie. Ces jeunes « cherchants » seront, sans aucun doute, les suppléments d’âme de demain.
Mais pour découvrir, il faut d’abord chercher.
Oui, mais chercher comment ?
Chercher seul ?
Pour partie surement, pour forger son humilité, son mental pour accepter l’idée d’un collectif. Pour le reste, c’est ensemble que se construisent les équipes, parce qu’un groupe est bien plus fort qu’une addition d’individus. C’est donc par la transmission des valeurs que se bâtit un avenir, un lendemain.
Apprendre, c’est poursuivre, c’est entendre mais c’est aussi dire …
Faut-il alors tuer le père pour exister ?
Evidemment que non ! Mais à la condition que le père, que celui qui sait, sache s’effacer pour que s’ouvrent de nouveaux horizons à ceux qui courent, qui luttent qui guerroient aujourd’hui et qui se transmettent une étrange boule de cuir de l’un à l’autre, solidaires et armés du savoir de ceux d’hier.
La sagesse c’est transmettre, apprendre, entendre parfois sans comprendre mais refaire, c’est la signature des sages de demain.
Les jeunes joueurs cheminent pas à pas sur la voie de la connaissance, découvrant les valeurs humaines qu’ils doivent s’approprier, tout autant que les gestes, que la puissance et que l’abnégation. Ils ne doivent pas brûler une étape sous peine de sortir du chemin tracé.
Mais qu’existe-t-il donc de si précieux pour que les anciens éprouvent le devoir de le transmettre ?
Les valeurs et puis le jeu ?
Le jeu et puis les valeurs ?
Il faut dire que de très nombreuses générations ont précédé celle qui fait battre aujourd’hui le cœur du club : ces générations passées ont transmis leur savoir pour que leurs traditions se perpétuent.
Cocteau écrivait d’ailleurs :
« La tradition est une statue en marche. »
Ce legs, venu du passé, éclaire un champ individuel, intime et s’affirme dans la confrontation fraternelle et collective de l’équipe.
C’est cela l’héritage, l’unique héritage et c’est bien cela qui se transmet, l’esprit et la règle, la passion et l’envie.
C’est accepter de recevoir quelque chose qui correspond à chacun, qui rejoint quelque part chaque être, mais en même temps qui vient d’un autre et qui va modifier l’essence même de chaque humain.
“Le passeur est celui qui sait qu’il est second, et non premier, et qu’il a reçu une mémoire énorme. Il sait également qu’il n’est pas le dernier et qu’il doit transmettre.”
Armand Abécassis
Jacques Servia